"A GROS LEURRES, GROS BROCHETS"

 

C’est un adage bien connu dans le petit monde de la pêche. Alors, vrai ou pas vrai ? Difficile d’être totalement affirmatif, tant l’expérience nous montre que la réalité est bien loin d’être aussi simple. En effet, on peut tout à fait prendre un brochet énorme avec un leurre minuscule, pour peu d’être passé au bon endroit et au bon moment. Inversement, il arrive de prendre des sifflets à peine plus gros que le leurre.

Pourtant, il semble bien que, d’une manière générale, la pêche avec de gros leurres permette de sélectionner la taille de ses prises, et de potentialiser ses chances de prendre un « vrai gros ». Plusieurs raisons à cela :

Tout d’abord, une proie de grande taille apportera au brochet un apport énergétique important, équivalent à plusieurs petites proies, or il lui faudra dépenser moins d’énergie pour chasser une seule grosse proie que plusieurs petites, le rapport dépense / gain d’énergie lui étant ainsi favorable. C’est d’autant plus vrai si cette grosse proie paraît affaiblie, donc facile à attaquer (le brochet n’étant pas un coureur de marathon), or l’on sait que les gros brochets sont opportunistes (pour ne pas dire un peu pantouflards) et sont de très bons régulateurs en s’attaquant aux poissons malades.


Brochet de 60 cm pris avec un leurre de 20 cm

Il est ainsi connu et démontré (Cf encore l’étude sur les cycles alimentaires des brochets dans le n°35 de « Brochet Sandre Magazine »), que les brochets peuvent assimiler des proies d’environ 1/4 à 1/3 de leur propre taille, même si ce rapport semble décroître jusqu’à 15% pour les plus gros sujets. Il n’empêche que pour un brochet de 60 cm, cela donne une proie de 15 à 20 cm, et à peu près la même chose pour les grosses mémères de plus du mètre !

Ensuite, ces grosses proies passent rarement inaperçues et elles brassent beaucoup d’eau, déclenchant des vibrations qui attirent facilement l’attention des prédateurs. Elles sont donc susceptibles de provoquer des attaques réflexes d’agressivité, et l’on connaît le caractère territorial et irascible de Maître Esox. Même si ce n’est pas pour se nourrir, il est probable qu’un brochet voudra dire à cet intrus « pousse toi de là, tu es chez moi ! ». Qui ne connaît pas ces histoires de brochets pris à la ligne et attaqués par des monstres alors qu’ils sont ramenés au bord ? Ou qui n’a jamais pris un brochet de 50-60 cm portant de profondes plaies, signes évidents d’une attaque, notamment après la période de frai ?


Un petit brochet attaqué par un gros

Qu’il s’agisse d’une motivation de nourriture, ou d’agressivité, on voit bien que des proies de 15 à 20 cm ne font pas peur à « grandgousier » et qu’au contraire, elles peuvent aider à réaliser le rêve de nombreux pêcheurs de brochet : en prendre un de plus d’un mètre ! A condition de respecter quelques règles simples, car on ne croise pas non plus des brochets de cette taille tous les jours dans toutes les eaux et cette technique peut être très ingrate, avec de nombreuses bredouilles à la clé. Il est notamment indispensable de rechercher des eaux où la proportion de gros brochets est importante, ce qui peut correspondre à deux caractéristiques : des secteurs très peu pêchés depuis des années, ou de grands biotopes. Les fleuves et les grands lacs sont des endroits parfaits pour pratiquer ainsi, surtout si la pression de pêche y est raisonnable.

La seconde règle est de posséder du matériel adapté. Cannes à truite s’abstenir ! Que ce soit la canne, le moulinet, le fil, ou les petits ustensiles (hameçons, émerillons…) tout doit être prévu pour supporter des appâts lourds et un combat avec un gros bec qui peut dépasser les 10 kg. Je rappelle souvent une règle simple : il s’agit d’une chaîne qui n’aura comme résistance que celle de son maillon le plus faible. Bien entendu, il s’agit là de matériel surdimensionné pour nos pêches habituelles, et sortir un brocheton de 50 cm n’apportera aucun plaisir. De plus, ce matériel est fatigant, mais autant je suis devenu un adepte des cannes courtes et du matériel léger pour mes pêches « normales », autant je suis convaincu que si l’on veut se spécialiser dans la traque des gros en mettant toutes les chances de son côté, il faut ce qu’il faut. Pour avoir vu en Irlande plusieurs amis casser sur de gros brochets en quelques secondes pour un nœud mal fait ou un frein trop serré, je sais que les gros brochets ne jouent pas dans la même cour que les autres, et ne pardonnent aucune erreur.

Abordons maintenant les techniques possibles, en commençant par les plus classiques.

 

La pêche au vif

Bien qu’elle ne soit pas la technique la plus sportive, elle possède encore de sérieux atouts, en particulier pour le cas qui nous intéresse. En effet, les gros brochets sont souvent très méfiants, et il faut bien reconnaître que leur proposer une proie naturelle est une des manières les plus efficaces de les tenter. De plus, elle permet d’insister longuement sur un poste prometteur que l’on sait, ou soupçonne, comme étant occupé (arbre mort, vestige englouti…).

Cannes puissantes et moulinets robustes sont nécessaires. Personnellement, n’ayant jamais aimé les cannes à brochet, trop lourdes et rigides, je recommande d’utiliser des cannes à carpes, alliant une bonne action semi-parabolique à une grande réserve de puissance.

La principale difficulté tient aux vifs utilisés : essayez donc de lancer une ligne à vif eschée d’un chevesne de 500 g et vous m’en direz des nouvelles ! Cette technique est donc préférable en barque, où l’on peut laisser descendre sa ligne sous le bateau sans avoir à la lancer. On peut utiliser un montage à flotteur coulissant, ou un montage pater noster.

Comme toujours au vif, pensez à utiliser un montage à 2 hameçons (mais vu la taille des vifs, c’est ici quasiment obligatoire) et ferrez à la touche. L’histoire d’ « attendre le 2ème départ » ou de « griller une cigarette avant de ferrer » est une profonde imbécillité qui a condamné à mort des milliers de petits brochets.

 

La pêche au mort posé

Voilà une technique peu utilisée en France, ce qui n’est pas le cas dans les pays anglo-saxons, et qui trouve tout son intérêt dans la recherche des gros becs. Il est possible de remplacer les vifs traditionnels par des poissons marins (sardines, maquereaux, harengs…), ce qui simplifie le ravitaillement : un petit passage chez son poissonnier et le tour est joué. Pas de problème non plus de conservation ni de transport. Ces poissons marins ont une chair grasse qui dégage pas mal d’effluves dans l’eau. Un autre intérêt tient au fait que comme ces poissons sont morts, il est possible de les fixer solidement sur la ligne, en utilisant une aiguille à locher ou du fil, et en fixant un hameçon en tête et l’autre sur le tiers arrière. Le dernier avantage est de présenter un poisson mort, ou semblant moribond s’il est maintenu décollé avec des bouts de polystyrène ou une monture de type JPK, donc une proie facile qui peut tenter un gros brochet paresseux et méfiant.

Côté matériel, il s’agit du même que pour la pêche au vif, les cannes à carpes étaient d’ailleurs plébiscitées par Mick Brown, l’un des spécialistes anglais de la pêche au poisson mort posé. Il est d’ailleurs possible d’emprunter d’autres matériels aux carpistes pour cette technique : rod-pods, détecteurs de touches électroniques, etc…

 


Pêche au poisson mort en bateau

 

La pêche au poisson mort manié

Il ne me serait pas forcément venu à l’esprit de citer cette technique parmi celles utilisant de gros appâts, si je n’avais pas lu il y a quelques années un article dans « la Pêche et les Poissons » sur un guide de pêche qui traquait les gros brochets en lac de barrage en utilisant des cannes à silure et des maquereaux en guise de mort manié ! Les résultats semblaient être au rendez-vous. Mais de l’aveu même de ce guide, c’est une technique quelque peu… fatigante ! Si le cœur vous en dit…

 

La pêche aux leurres

Je vais m’attarder un peu plus, d’une part car il s’agit d’une technique sportive que nous souhaitons privilégier, d’autre part car il convient de présenter le matériel et les nombreux leurres possibles (de plus en plus disponibles sur le marché français).

Par rapport aux techniques précédentes, la pêche aux leurres présente plusieurs avantages : plus de problème de ravitaillement et de conservation des appâts ; simplicité de mise en œuvre ; un leurre, même de 20 cm, pèse bien moins lourd qu’un vif de même taille (à l'exception spécifique des gros jerkbaits qui nécessitent une forte inertie); pêche de prospection active permettant de couvrir du terrain à la recherche des brochets mordeurs.

Côté cannes, on trouve maintenant différentes possibilités. Des cannes mort manié puissantes (genre 20-80 g) peuvent tout à fait convenir si on n’utilise pas les leurres les plus lourds (certains dépassent allègrement les 100 g !!!). De même pour les cannes mer. On en trouve dans tous les catalogues de pêche. Il existe également des cannes spinning spécifiques « gros poissons » pour la pêche exotique, qui peuvent atteindre 180 ou 200 g de puissance. Sans parler des cannes silures. Bref, un grand choix selon le type de leurres que l’on pense utiliser et la longueur que l’on souhaite (de 1m80 à 3m30 !).

Pour les amateurs, il existe également des cannes casting parfaitement adaptées à ces gros leurres (Fox, Rozemeijer, St Croix...), ce qui permet d’avoir une canne courte, très puissante, et avec un système de moulinet à tambour tournant qui se prête admirablement bien à ces leurres lourds. Un moulinet très solide type Abu Garcia 6501 est alors vivement recommandé.

Pour les leurres, autant il y a quelques années le choix se limitait aux Rapala Magnum, autant aujourd’hui on commence à disposer d’un réel choix de gros leurres. En particulier, parmi les poissons nageurs on trouve de plus en plus de gros jerkbaits à animer, d'une efficacité parfois redoutable. Mais aussi de grosses cuillères tournantes ou ondulantes, ou encore de gros leurres souples. Passons en revue quelques modèles possibles, qu'on peut généralement trouver en France (enfin, il faut parfois chercher un peu quand même…). Il en existe de nombreux autres, à vous de les trouver et de les tester.

Les poissons nageurs et jerkbaits

Chez Rapala :


Magnum 14, 18 et 22 cm / 36 à 100 g en version plongeante mer
(un peu plus léger en version flottante)

 


Super Shad Rap 14 cm / 45 g en version flottante
71 g en version coulante ("countdown")

 


Sliver 20 cm / 38 g

X Rap Jointed Shad XJS 13 cm / 46 g
(nouveauté 2006)

 

Chez Salmo :


Warrior Crank

Slider

Pike

Perch

Skinner

Fatso

 

Chez Fox :


Bullnose

Demon

Runt

Jointed Runt

Slim Dolphin

Raider

Belly Up

Slayer

 

 

Chez Mann’s :


Stretch Plus 20+ 16,5 cm / 85 g

Jointed 25+ 20,5 cm / 57 g

 

 

Chez Megabait :


Mega Diver

Mega Swimmer

 

Chez Musky Mania :


Ernie 15 cm / 42 g ou 22,5 cm / 87 g

Burt

Chez Offshore Angler :


Salt Shallow Runner 20 cm / 52 g

Chez Musky Innovations :

 


Super Freak

 

Chez Smith / Marryat France :


Buster Jerk

Belly Buster

 

 

Les leurres souples et swimbaits

 

Chez Sosy :


Perche 17 cm / 60 g - Brochet 24 cm / 50 g

 

Chez Musky Innovations :


Bull Dawg

Chez Lunker City :


Fin S Fish 25 cm

 

Chez Lunker City :


Slug Go 22,5 cm

 

Chez Musky Innovations :


Twin Fin 22,5 cm / 168 g

Chez Storm :


Wildeye Swim Shad 13 cm / 43 g

Il existe de nombreux autres modèles de leurres souples de grande taille, notamment de simples shads ou grubs à monter sur tête plombée.

Les spinnerbaits et les cuillères :

Chez Strike King :


Magnum King 56 g

 

Chez Fox :


Destroyer 56 g / Charger 42 g / Laser 28 g

 

Chez Fox :


Weedbuster / Inducer / Polaris

 

Chez Rozemeijer :


Musky Buster 60 g

 

Chez Mepps :


Giant Killer / Musky Killer / Tandem / Aglia n°7 / Lusox n°4

 

Chez Mepps :


Giant Marabou